Récit de rando sur le GR5 de Aubure à Montbéliard

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    Le 04-10-07    Aubure à les Trois Fours

Malgré quelques gouttes dans la nuit, il fait tellement bon que j'ose le short-T-shirt. Cette fois on prend réellement de l'altitude. Terminé les sommets qui tutoient les 1000m pour ensuite redescendre. Aujourd'hui je vais passer pas mal de temps au dessus de 1200m.

Je ne passe que quelques instants à Aubure, pour refaire le plein d'eau, et j'attaque la montée du Grand Brézouard. Une biche et son faon détournent leur chemin pour me laisser passer. L'état de ma semelle gauche n'empire pas mais occupe mon esprit. Il faut que je trouve une colle qui tiendra le coup au prochain village.

Une montée annonçant une descente, me voilà vite redescendu au Bonhomme, 690m, pour le ravitaillement de la journée. C'est un petit village de montagne et le point ravitaillement est une boucherie qui fait office d'épicerie fine. Bref le choix n'est pas énorme et on n'y trouve bien sûr pas de glue.

Le profil de cette étape se fait sentir dans les jambes, car à peine suis-je sorti du magasin, que je me retrouve sur un sentier pour remonter à plus de 1200m. La côte jusqu'à la Tête des Faux est garnie d'ouvrages militaires de la 1e guerre mondiale. Abris et autres fortins flanquent la montagne.

Je profite d'ailleurs d'un abri-infirmerie à l'étang du devin pour manger au soleil. Un peut plus loin, c'est le départ d'un funiculaire souterrain de 1100m, dont le tunnel est maintenant effondré. Le cimetièreDuchesne rappelle l'horreur des combats qui se sont déroulés ici. Mais l'amoncellement de rochers et de restes d'ouvrages militaires rendent la vie dure à mes chaussures, car il n'est pas rare que je butte sur un bloc de béton et une ferraille qui dépasse. D'autant que je vois le bout de mes réserves de sparadrap...

Le Gazon du Faing passé, tantôt en montant, tantôt en descendant, le GR suit une ligne de crête à 1300m d'altitude, offrant une vue magnifique des deux côtés. Et je ne suis pas le seul à apprécier, l'endroit est vraiment plein de monde. Cette crête est curieusement couverte d'une sorte de lande qui nous transposerait presque en Ecosse. Et cette lande me fait réfléchir quand à l'impossibilité d'installation d'un bivouac.

Mais mon attention est ramenée à quelque chose de plus présent et plus dramatique, lorsqu'à la suite d'un coup de pied dans une pierre, ma semelle droite se décolle sur la moitié de sa longueur. Je ressors mon sparadrap pour confirmer que je colle ici ma dernière longueur, et pas un village en vue avant demain midi !

Seule chance : les boutiques du col de la Schlucht. Le stress me fait oublier toute fatigue et j'arrive prestement au col. Par chance le premier commerçant sort du tiroir de son comptoir de la colle néoprène, ça tiendra, c'est sûr. Je prends donc 20 minutes pour recoller mes deux semelles et  il me laisse le tube au cas où. Ah les gens des montagnes ont ce truc particulier qui fait que je les apprécie.

Le temps de trouver un coin pour s'installer et une semelle se redécolle déjà. Dans l'urgence, je n'ai sûrement pas assez bien nettoyé les surfaces encollées. Je m'applique donc, avant de manger, à refaire un travail propre et durable, qui sèchera toute la nuit.
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    Le 05-10-07    les Trois Fours au col Amic

J'ai bien compris hier soir sur le papier que cette étape allait se faire sentir : se taper dans la matinée 1300 - 500 - 1300 ça va pas être drôle. A 6h30 je suis réveillé par une drôle de bête : un randonneur qui marche à la lampe frontale car il fait encore nuit. Motivé le mec, ou pressé d'arriver.

J'aperçois un chamois, sur la route du Hohneck, qui a tôt fait de disparaître dans les falaises. Au sommet, il y a un vent de fou et la température descend franchement. Après 1km dans les pierres, mes deux semelles se redécollent. Je pense que la colle n'est pas faite pour subir de telles contraintes. Je marche en levant exagérément les genoux et songe à rejoindre Metzeral et sa gare SNCF.

Dernière chance d'arriver au bout, je me mets en quête de fil de fer sur toutes les clôtures que je longe. J'en trouve rapidement un morceau, que j'enroule autour du bout du pied, et que je maintiens en place avec mes lacets. Cette fois j'ai vraiment l'air d'un clochard...

Grosse descente vers Mittlach où, pour rajouter à ma malchance, la Coop a fermé l'an dernier ! Il me reste mon repas de midi et pas de ravitaillement possible, d'autant que Mittlach est le seul village que je vais traverser aujourd'hui.

Après près de 2h de remontée, j'arrive sur la ligne de crête et je trouve un second fil de fer. Cette fois c'est sûr, même si ce rafistolage saute régulièrement et m'oblige à le remettre en place, j'irai au bout.

Au Markstein, station de sport d'hiver, se trouvent quelques boutiques, où j'achète un sandwich pour ce soir. Tant que j'y suis, je me paye une part de tarte et un jus de fruits pour le plaisir. Et face à moi se dresse déjà le Grand Ballon, sommet le plus haut des Vosges.

C'est la dernière ascension de mon périple et elle m'amène à 1424m, où la station radar ressemble à la proue d'un navire, et un monument commémore le sacrifice des bataillons de chasseurs durant la guerre de 14-18.

Cette fois c'est presque la fin et cette descente sent l'écurie. Grosse descente tout du même, dans un premier temps sur les pistes de ski, puis dans les sous-bois.

Je galère pour m'installer car je ne trouve pas un emplacement correct et plat pour monter mon tarp. D'autant qu'il y a beaucoup de vent et que je ne souhaite pas m'installer n'importe comment pour ensuite le regretter toute la nuit.
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    Le 06-10-07    col Amic à Thann

J'ai finalement eu trop chaud cette nuit, mais ce matin c'est un réveil humide et dans le brouillard. Qu'importe, c'est la dernière journée et il me reste moins de 15km à avaler, et en descente qui plus est.

Je passe par le cimetière du Viel Armant (30 000 Français) pour arriver au dernier château : Engelsbourg. Lors de son démantèlement par les troupes de Turenne en 1674, on fit sauter le donjon cylindrique, dont une section se renversa sans se briser et reçut le surnom d'oeil de la sorcière.

Un dernier repas en ville et me voilà dans le train du retour.

Je suis satisfait de mon menu, quoi qu'il y manque quelques calories pour arriver à 3000, mais cette différence est comblée par ce que j'ai pu trouver en route (raisin, pomme, châtaigne, mûre). En plus il produit peu de déchets et je ne m'encombre pas d'une poubelle trop lourde.

Je suis définitivement conquis par ma liste de matériel pour conserver un sac léger (6.5kg de matériel, + eau + nourriture). Mais j'ai trouvé quelques points qui peuvent encore me faire gagner quelques centaines de grammes. 
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    Le 17-03-08    Thann au col de Rimbach

Je prends une nouvelle fois le train pour ce tronçon de jonction entre les Vosges et le Jura. Et mon train est de nouveau en retard : 2h à l'arrivée ! Assis sur mon siège de 2e classe, je rumine. En effet, il faut que je absolument que je sois à Montbéliard dans 2 jours avant 13h33, sans quoi il faudra que j'attende le lendemain 10h pour repartir.

J'arrive à 16h10 et la course contre la montre commence. Je sais par habitude que je marche un peu plus vite que ce qui est indiqué sur le topo, et aujourd'hui j'ai une botte secrète : des bâtons. Après quelques temps de synchronisation, dès que le sentier s'élève, je m'envole. Je marche réellement plus vite.

Il pleut et je fonce. Dans les descentes, les bâtons soulagent mes genoux ; dans les passages délicats, ils m'équilibrent et je passe sans perdre de temps. Finalement j'arrive à 18h30 à l'endroit prévu pour passer la nuit, une petite cabane plantée en haut d'un col. Il ne me reste que peut de temps avant la nuit.

A l'intérieur se trouve un calendrier où chaque randonneur a inscrit son passage. Je ne manque  pas à la tradition. Il n'y a pas beaucoup de place (en fait je rentre juste entre le banc et la table, mais au moins je serai à l'abri pour cette nuit que la météo annonçait fraîche. 
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    Le 18-03-08    Col de Rimbach à Chalonsvillars

Réveil 6h, la météo avait vu juste : la nuit a été glaciale. Vraiment ? Oui, ma bouteille d'eau a gelée... Il ne me faut que 30 minutes pour me préparer mais déjà mes mains sont gelées et j'ai du mal avec mes lacets et les clips de mon sac à dos.

Je repars sur une crête en direction du ballon d'Alsace. Le mouvement de mes bras pour animer mes bâtons contribue à me réchauffer. Je passe au dessus du lac des perches, dommage que l'horizon soit bouché par des nuages. Alors que le sentier devient plus abrupt aux abords du sommet, un chamois vient me narguer.

De la neige est encore présente sur le versant nord mais le sommet est dégagé. Rien n'est ouvert pour une boisson chaude, alors je redescends (le vent glacial ne m'incite pas à rester). J'avance vite et je ne devrais pas avoir de problème pour être à Montbéliard demain avant 13h33, soulagement.

Dès la pause de midi, me voilà redescendu à 500m d'altitude et le temps est bien meilleur qu'en haut. Je serpente entre de nombreux étangs entre Giromagny et Evette. Dernière difficulté du parcours : 200m d'ascension pour monter au fort du Salbert, belle vue.

Je profite d'une source dans la descente pour faire une dernière fois le plein d'eau. J'ai beaucoup marché aujourd'hui et je m'installe dans la forêt de bonne heure. Ce soir, je dois aussi tester pour la première fois le montage de mon tarp sans arbre, avec les bâtons comme supports. Je ne suis pas déçu, ça se monte tout seul (presque).

Dès la pause de midi, me voilà redescendu à 500m d'altitude et le temps est bien meilleur qu'en haut. Je serpente entre de nombreux étangs entre Giromagny et Evette. Dernière difficulté du parcours : 200m d'ascension pour monter au fort du Salbert, belle vue. 
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    Le 19-03-08    Chalonvillars à Montbéliard

Même si je suis à 400m d'altitude, ce matin aussi il fait froid. Tout est givré autour de moi, même mon tarp. étant donné la distance qu'il me reste à parcourir, je me suis accordé une grasse mâtinée : réveil 7h. Mais le froid me donne envie de rester au fond de mon duvet.

Peut après que j'eusse quitté le GR5 (qui contourne Montbéliard), je tombe sur un os : les travaux de la Ligne à Grande Vitesse me barrent la route. Impossible à un randonneur de traverser. Je consulte ma carte pour faire un petit détour mais impossible de contourner l'obstacle, je tombe de nouveau sur les travaux titanesques.

Impossible de choisir un itinéraire de contournement, les travaux sont énormes et pas indiqués sur la carte. je ne sais donc pas jusqu'où je dois aller. Finalement, après avoir demandé l'autorisation à un conducteur d'engin, je traverse.

J'arrive finalement en agglomération jusqu'à la gare de Montbéliard. Voilà, la partie nord de ma traversée est bouclée : 750km de Wissembourg à Genève. A quand les Alpes ?


Précédemment, de Wissemboug à Aubure